L’histoire migratoire franco-algérienne, longtemps caractérisée par un flux unidirectionnel vers le nord, connaît aujourd’hui un revirement spectaculaire. De plus en plus d’algériens de France choisissent de s’établir en Algérie, à la recherche de liberté et d’opportunités, témoignant d’un changement profond dans les aspirations et les identités de cette communauté.

Aéroport International d’Alger Houari Boumediene

Pour TenereFafa, 28 ans, le retour en Algérie en 2016 a marqué le début d’une nouvelle vie. Issue d’une famille musulmane de troisième génération en France, elle a longtemps cherché sa place dans un pays où sa foi et son mode de vie étaient devenus sources de malaise. “En France, l’expression de ma foi me confrontait à l’isolement et à la discrimination. En Algérie, je vis ma spiritualité librement, sans crainte ni jugement,” confie-t-elle. Cette liberté retrouvée est partagée par de nombreux Algériens de France qui, comme elle, ont décidé de faire le chemin inverse de leurs parents ou grands-parents pour des raisons religieuses, culturelles ou professionnelles.

Au-delà de la quête spirituelle, le retour en Algérie est également motivé par la recherche de nouvelles opportunités économiques. La jeunesse algérienne de France, bien formée et dynamique, voit dans leur pays d’origine un terrain fertile pour l’entrepreneuriat et le développement de projets innovants. Rym Bouguetaïa, 29 ans, entrepreneure à la tête de Eryam Cosmetics, incarne cette ambition. “J’ai toujours rêvé de contribuer au développement de l’Algérie. Malgré les défis bureaucratiques, lancer mon entreprise ici a été la meilleure décision de ma vie,” affirme-t-elle.

Cependant, le chemin du retour n’est pas exempt d’obstacles. Les réformes législatives en Algérie, bien que visant à encourager les investissements de la diaspora, se heurtent encore à une administration lourde et à des infrastructures en développement. Le gouvernement algérien, conscient de cet enjeu, multiplie les appels à l’investissement et tente de faciliter l’intégration des retournés.

La décision de nombreux Algériens de France de retourner en Algérie est également influencée par le climat politique en France. La montée de l’islamophobie, cristallisée par des lois restrictives et une atmosphère de plus en plus pesante, pousse certains à chercher un environnement plus accueillant. “La France, où j’ai grandi, semble de moins en moins être un lieu où l’on peut vivre sa foi librement,” témoigne Ahmad, étudiant en science politique.

Ce mouvement de retour en Algérie par les Algériens de France soulève des questions importantes sur l’identité, l’appartenance et le futur partagé entre les deux rives de la Méditerranée. Si certains voient dans ce phénomène un potentiel de renouveau et de rapprochement, d’autres y discernent les signes d’une fracture grandissante. Ce qui est certain, c’est que les histoires de ceux qui traversent la Méditerranée dans un sens comme dans l’autre continueront de façonner les relations franco-algériennes pour les années à venir.

L’Algérie apparaît aujourd’hui non seulement comme un refuge pour ceux qui cherchent à vivre leur culture et leur foi librement mais aussi comme une terre d’opportunités pour les entrepreneurs et les créatifs. Cette dynamique inverse de migration illustre les transformations sociales et économiques en cours, mais aussi les défis que ces nouveaux arrivants doivent relever pour construire un avenir prometteur dans leur pays d’origine.

By mel